Ces innovations qui pourraient sauver les récifs coralliens
Les récifs coralliens sont parmi les écosystèmes les plus richement diversifiés de la planète. Mais, comme nous le savons, ces derniers sont aujourd’hui menacés par le réchauffement climatique, la pollution ou encore l’acidification des océans. Face à ces enjeux, la restauration naturelle ne suffit plus toujours. Et il peut être intéressant de faire appel à d’autres approches : biologie, robotique, intelligence artificielle, matériaux. La science et la technologie développent en effet des innovations prometteuses qui ouvrent de nouvelles perspectives pour protéger et reconstruire les récifs.
Plongeons ensemble dans ces solutions innovantes.
Biologie synthétique : vers des coraux plus résistants
La biologie synthétique peut permettre de rendre les coraux plus résistants à la chaleur et à l’acidification. Voici quelques exemples :
- Les super coraux : En étudiant les coraux dits « super‑coraux », ceux qui résistent naturellement aux températures élevées, des chercheurs — notamment Ruth Gates ou plus récemment Andrew Baker — ont identifié des variétés particulièrement résilientes. En croisant ces coraux en laboratoire, ils visent à produire des générations plus résistantes au stress thermique et à l’acidité.
- Modification de l’ADN des zooxanthelles (micro-algues symbiotiques) : Les coraux vivent en symbiose avec des micro-algues appelées zooxanthelles. En modifiant génétiquement ces micro-organismes ou leur association avec le corail, il serait possible d’améliorer la résistance au réchauffement (1)
Il est toutefois important de souligner que modifier génétiquement les coraux pose également des questions éthiques : intervention invasive ? Risques écologiques imprévus ? Des discussions sont en cours pour encadrer durablement ces pratiques.
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Biologie synthétique : vers des coraux plus résistants
Afin d’accélérer la restauration des coraux lorsque les humains ne suffisent plus, les drones et robots peuvent être utiles :
COTSbot détecte et élimine l’étoile de mer-perceur (Acanthaster planci), un prédateur naturel des coraux, avec une précision de 99,4 % (2).
- LarvalBot (ou RangerBot) est un drone qui disperse des larves de corail issues de « coral IVF » sur les récifs endommagés. Il peut ainsi relâcher jusqu’à 3 millions de larves en 3 heures, couvrant ainsi de vastes zones.
En 2019–2020, une flotte a ainsi été déployée dans la Grande Barrière (3).
Ces robots sont peu encombrants, modulaires et évolutifs. Pourquoi pas, à terme, les déployer partout dans le monde, notamment dans les aires marines protégées et les zones vulnérables.

Credit image : IFLSCIENCE

Credit image : Great Barrier Reef Foundation – Gary Cranitch, Queensland Museum
Intelligence artificielle : surveiller les récifs en temps réel
L’utilisation de l’IA et du deep learning peuvent nous aider à cartographier les récifs, suivre l’évolution de la biodiversité ou encore détecter plus rapidement les zones de blanchissement des coraux.
- CoralNet, créé à l’Université de Californie-San Diego, automatise l’analyse d’images sous-marines, des milliers d’images peuvent être traitées 10 à 100 fois plus vite qu’à la main.
- Le projet “Automatic Coral Detection with YOLOv5” utilise des réseaux neuronaux pour identifier différents morphotypes de coraux en temps réel (4)
- Des modèles comme Coralscapes permettent la segmentation sémantique 3D des récifs, facilitant la quantification de la couverture corallienne à grande échelle (5)
Les avantages ? une détection précoce du blanchiment des coraux ou d’espèces envahissantes et une prise de décision possible plus rapidement pour les scientifiques.
Récifs artificiels et matériaux innovants : des habitats pour la vie marine
Plusieurs alternatives innovantes permettent de recréer les structures coralliennes :
- Du béton marin adapté aux océans. En Australie, la société Coral Maker exploite des granulats de béton recyclé ainsi que la conception 3D afin de produire les squelettes à destination des coraux. Les coraux sont ensuite transplantés sur ces squelettes grâce à des bras robotisés et guidés par l’IA.
- Des modules bio-inspirés conçus pour optimiser l’accueil de la vie marine. C’est notamment ce que propose la société australienne Reef Design Lab qui développe des infrastructures marines à destination des gouvernements, centres de recherche..
Ces structures offrent un refuge immédiat aux poissons et invertébrés et favorisent une recolonisation rapide.
Une alliance entre science, écologie et citoyens
Les récifs coralliens ne pourront être sauvés que si l’innovation scientifique s’appuie également sur la force des hommes. À travers le monde, de nouvelles alliances voient le jour, où chercheurs, ONG, populations locales, enseignants et plongeurs unissent leurs efforts pour comprendre, restaurer et protéger les coraux.
Les projets de restauration corallienne les plus durables sont ceux qui impliquent activement les populations locales. Loin d’imposer des solutions, les ONG et les chercheurs cherchent à transmettre des compétences, notamment à travers :
- des formations au bouturage de coraux pour les pêcheurs, les guides de plongée ou les jeunes habitants ;
- des ateliers de manipulation de robots marins, d’outils de suivi ou de capteurs environnementaux ;
- des programmes éducatifs intégrés aux écoles locales pour initier les enfants à l’écologie marine.
Le programme Coral Restoration Foundation International travaille notamment en collaboration avec des communautés aux Caraïbes et en Floride pour planter des fragments de corail et suivre leur évolution.
Grâce aux nouvelles technologies, tout le monde peut contribuer à la connaissance des récifs :
- Plongeurs, snorkelers, écotouristes, habitants côtiers sont invités à prendre des photos, signaler des espèces, détecter des blanchiments.
- Des applications comme ReefCloud, CoralWatch ou iNaturalist permettent de centraliser et d’analyser ces données, souvent via de l’intelligence artificielle.
Des super-coraux génétiquement renforcés, aux robots sous-marins comme LarvalBot, en passant par l’IA qui surveille nos récifs ou les structures artificielles 3D, les innovations foisonnent. Elles offrent des pistes concrètes pour préserver un écosystème fragile mais vital. Cependant, ces avancées ne remplaceront jamais des gestes de conservation, une réduction des émissions CO₂ et une lutte collective contre la pollution. En combinant l’ensemble, nous pouvons redonner espoir à nos récifs.