Redonner vie aux récifs coralliens : Les Méthodes de restauration

Quel rôle jouent les récifs coralliens ?

Les récifs coralliens jouent un rôle crucial dans l’équilibre des écosystèmes marins, (Chaukaa et Nyangoko, 2023). Leurs importances écologiques, économiques et sociaux sont significatives, tels que la protection des côtes, ils abritent une biodiversité extrêmement riche (Mora et Andréfouët, 2008), ils permettent de réguler le climat et le cycle du carbone en tant que puits de carbone, ils fournissent de la nourriture et de l’emploi à plus de 500 millions de personnes avec le tourisme, la pêche et les loisirs (Hoegh-Guldberg et al., 2019 ; Chaukaa et al., 2023).

Photographie d’un pêcheur local sur l’île Rodrigues, capturée par Blueroceanproject

Quels sont les principaux défis auxquels les récifs coralliens sont confrontés ?

Cependant, les récifs coralliens sont confrontés à des défis tels que le changement climatique, avec l’augmentation de la température et l’acidification des océans, ce qui compromet leur santé et leur résilience (Chaukaa et Nyangoko, 2023). De plus, les récifs sont menacés par l’anthropisation, telles que la surpêche, le tourisme intensif, l’aménagement des côtes, la sédimentation, la pollution et la dégradation de l’habitat (Chaukaa et Nyangoko, 2023).

État critique : les récifs coralliens en danger

Photographie d’un corail blanchi en raison du réchauffement des eaux provoqué par le changement climatique, capturée par Reefscapers

La dégradation des récifs coralliens a atteint un point critique à l’échelle mondiale. Selon la communauté scientifique, si nos activités actuelles ne ralentissent pas, les récifs coralliens pourraient disparaître complètement d’ici dix ans (FRANCE 24, 2025). Il est donc crucial d’agir pour freiner le changement climatique et préserver ces écosystèmes essentiels. Face à cette urgence, de nombreuses associations se mobilisent. Les biologistes marins utilisent la restauration des coraux comme une stratégie ciblée pour atténuer la dégradation des récifs et augmenter la surface corallienne.

La restauration corallienne c’est quoi ?

La restauration corallienne est un processus visant à réparer les récifs endommagés ou altérés dans leur condition physique, biologique ou fonctionnelle. Elle consiste à mettre en œuvre des actions spécifiques pour les maintenir dans un état stable ou les ramener à leur état d’origine.

Quelles sont les limites de la restauration corallienne face aux pressions globales et locales ?

La restauration corallienne, à elle seule, ne suffira pas à sauver les récifs ! Une réduction significative de nos émissions de gaz à effet de serre est essentielle pour freiner le changement climatique, qui se manifeste dans l’océan par l’augmentation des températures et son acidification, impactant directement les récifs coralliens et les écosystèmes marins. 

Par ailleurs, les pressions locales aggravent également l’état des récifs. Il est donc crucial de lutter contre les techniques de pêche illégale, la pollution agricole, les rejets insuffisamment traités des stations d’épuration (STEP), ainsi que la sédimentation accrue liée aux activités humaines. La surpêche et les aménagements touristiques représentent également des menaces importantes. Ces activités anthropiques exercent une pression supplémentaire sur des récifs déjà fragilisés par les changements globaux.

Cependant, malgré ces défis, la restauration corallienne joue un rôle clé en complément des efforts visant à réduire les pressions globales et locales. Elle contribue à redonner vie aux récifs endommagés et à renforcer leur résilience face aux changements climatiques. Explorons maintenant les différentes méthodes de restauration corallienne utilisées à travers le monde.

Quelles sont les différentes techniques utilisées pour la restauration corallienne ?

On peut retrouver différentes méthodes de restauration selon les régions du monde. 

Les associations et organisations de restauration corallienne utilisent différentes techniques selon l’environnement et l’objectif recherché. Certaines régions, telles que les Caraïbes, ont comme but de restaurer les espèces en danger. En Indo-Pacifique, le but est plutôt d’augmenter la surface corallienne.

Les techniques de transplantation :

Propagation asexuée

La transplantation directe dans les récifs naturels consiste à récupérer des fragments de coraux directement sur des sites dégradés, sans passer par une phase de nurserie. Cette méthode peut également être qualifiée de replantation d’opportunité : lorsque des fragments se détachent naturellement à la suite d’événements comme un cyclone, ils sont collectés puis transplantés pour favoriser la régénération des récifs.

Le jardinage corallien ou bouturage est une autre méthode asexuée qui repose sur la culture de fragments de coraux provenant de colonies saines ou plus résistantes. Ce processus comprend deux phases :

  • Phase de nurserie : Les fragments sont d’abord cultivés dans des pépinières, qui peuvent être situées en laboratoire pour contrôler les conditions de croissance ou directement en mer dans des conditions naturelles. Ces conditions optimales favorisent leur développement.
  • Phase de transplantation : Une fois que les coraux ont atteint un stade de croissance suffisant, ils sont fixés sur des structures artificielles ou directement sur les récifs dégradés pour accélérer leur recolonisation.

La micro-fragmentation est particulièrement utilisée pour les coraux à croissance lente, comme le corail « cerveau ». Cette technique consiste à découper les coraux massifs en petits fragments de quelques centimètres, qui sont ensuite cultivés dans des nurseries avant d’être transplantés sur des récifs naturels. La micro-fragmentation permet une croissance plus rapide des coraux massifs que la fragmentation classique, accélérant ainsi leur restauration.

Propagation sexuée par stade larvaire (spawning)

La propagation sexuée repose sur le processus naturel de spawning, ou frai des coraux. Cette méthode implique plusieurs étapes :

  • La collecte des gamètes : Durant l’événement de frai, les gamètes sont collectés pour la fécondation.
  • La fécondation en laboratoire : Les gamètes sont fécondés en laboratoire pour produire des larves.
  • Fixation des larves : Les larves ainsi créées sont ensuite fixées sur des structures artificielles avant d’être introduites dans les récifs naturels.

Cette technique permet d’introduire une grande diversité génétique dans les récifs, renforçant ainsi leur résilience et leur capacité à s’adapter aux changements environnementaux.

 

Avantages

Inconvénients

Transplantation directe 

Méthode naturelle, sans recours à des éléments artificiels.

Méthode limitée, dépendante des fragments naturellement trouvés. 

Le Jardinage corallien ou bouturage

La phase de nurserie permet de contrôler les conditions de croissance. Utilisation de coraux sains et/ou résistants.

L’utilisation des espèces les plus résistantes peut entraîner, à terme, une perte de diversité.

La micro fragmentation

La croissance est plus rapide que celle observée avec la fragmentation classique pour les coraux massifs.

Cette méthode est principalement adaptée aux coraux massifs, ce qui limite son application aux coraux à croissance rapide. 

Propagation sexuée par stade larvaire

Cette méthode favorise une plus grande diversité génétique et est considérée comme plus naturelle.

Cette méthode est complexe et coûteuse, avec un taux de réussite variable, et le processus est long.

Les techniques de transplantation, qu’elles soient sexuées ou asexuées, sont souvent associées à la mise en place de récifs artificiels, tels que des structures en béton, des fils ou encore des formes d’arbres et de pyramides, pour offrir un support supplémentaire à la régénération des coraux. Ces structures jouent un rôle clé dans les méthodes de transplantation, en facilitant la fixation et la croissance des coraux transplantés.

Les méthodes de transplantation :

Méthode de restauration avec des structures en forme de pyramides : Ces structures sont directement installées dans les zones dégradées. Les fragments de coraux résistants sont accrochés à ces pyramides, leur permettant de grandir et de recréer de petits récifs offrant des zones de cachette pour les poissons. L’avantage de cette méthode réside dans la possibilité de déplacer les structures vers des zones plus profondes en cas de vagues de chaleur océanique, en attendant que les conditions reviennent à la normale.

Méthode de restauration sur des fils : Les fragments de coraux, résistants aux températures élevées, peuvent croître jusqu’à atteindre un stade adulte dans une nurserie contrôlée par les biologistes marins, qui assurent un suivi régulier avant de les replanter dans un récif naturel. Cette approche permet de recréer des récifs coralliens naturels plus résistants.

Création de socles en béton et pierre mélangée : Comme pour les structures en forme de pyramides, ces socles servent de structure de soutien pour le corail, permettant une croissance rapide grâce à leur fixation préalable. Une start-up, Coral Maker, a développé un processus robotisé avec de l’intelligence artificielle pour produire ces structures à grande échelle, à raison de 10 000 unités par jour (Array, 2023). Chaque structure peut accueillir jusqu’à six fragments de corail. Cette méthode optimise le temps et les ressources humaines, permettant ainsi de restaurer une surface plus grande.

Méthode de restauration sur une structure en forme d’arbre : Ces structures, qui peuvent être fixes ou mobiles (Pépinières de Corail | Résilience des Récifs, s. d.), servent également de nurseries pour les coraux résistants, comme avec la méthode sur fils. 

Méthode de restauration par électrolyse : Les fragments de corail sont fixés sur des structures métalliques, qui, une fois immergées, sont traversées par un courant de faible intensité (Futura, 2011). Ce processus provoque une électrolyse de l’eau, ce qui favorise une croissance accélérée du squelette des coraux en carbonate de calcium (Futura, 2011).

Chaque organisation adopte sa propre technique et méthode de transplantation pour restaurer les récifs coralliens. Le choix de la méthode dépend des espèces de coraux déjà présentes sur les récifs naturels, ainsi que des facteurs environnementaux spécifiques au site de restauration.

Chez The coral planters, comment restaurons-nous les récifs coralliens ?

La restauration corallienne chez The coral planters est réalisée par des spécialistes et des biologistes marins. La première étape consiste à collecter des fragments de corail, prélevés soit sur des colonies mères dans nos nurseries in situ, soit sur des fragments naturellement détachés (fragments d’anciennes colonies ayant déjà résisté aux épisodes de blanchissement précédents). Nous utilisons principalement des espèces d’Acropora (Acropora humilis, digitifera, cytherea, nasuta, secale et hyacintus), qui sont relativement résistantes aux vagues de chaleur océanique.

Ces fragments de corail sont ensuite transplantés sur une structure en métal, recouverte de couches de sable et de résine naturelle. Le sable, étant composé de minéraux naturels, favorise l’adhérence du corail à la structure.

Nos structures en forme de pyramide sont fabriquées sur place par la communauté locale. Elles existent en différentes tailles : petite (41 fragments), moyenne (65 fragments), grande (106 fragments) et en forme de cœur (45 fragments). Une fois les coraux transplantés, le récif artificiel est immergé dans une zone spécifique, à une profondeur de 5 à 10 mètres. La mobilité de ces structures nous permet de déplacer les récifs vers des eaux plus profondes en cas de forte augmentation de la température, d’épisodes de blanchissement ou de pollution de l’eau.

Photographie d’une structure pyramidale, capturée par Reefscapers.

Les résultats ?

Comme pour une forêt, il faut faire preuve de patience pour observer une réelle évolution des récifs coralliens. Après le bouturage, et si les coraux sont en bonne santé, les premiers résultats peuvent être visibles dès six mois.

À partir de ce moment, nous assurons un suivi tous les six mois et mettons à disposition du grand public des photos des récifs. Ces suivis permettent aux biologistes d’avoir des informations sur le taux de survie et mortalité des coraux.

Les structures sont entretenues afin d’éviter les dépôts d’algues qui pourraient étouffer les coraux.

Étapes de développement des coraux

  • Jour 1 : Les coraux sont nouvellement transplantés et en phase d’acclimatation à leur nouvel environnement.
  • 6 mois : Des signes de croissance apparaissent, montrant la résilience des coraux.
  • 1 an : Une augmentation significative de la croissance et de la diversité des coraux. Le récif devient alors un refuge pour d’autres espèces marines, comme les poissons.
  • 2 ans : La formation d’une structure complexe qui contribue à la restauration de l’habitat et à l’augmentation de la biodiversité.
  • 3 à 4 ans : Les coraux peuvent commencer à se reproduire naturellement, marquant ainsi une étape importante dans la restauration de l’écosystème.

Comment puis-je aider à mon échelle ?

Chacun d’entre nous peut participer à son échelle à la restauration des récifs coralliens en adoptant ou en offrant un corail et/ou récif à ses proches. En plus de pouvoir choisir le corail de ton choix, chacun à la possibilité de personnaliser le certificat d’adoption en ajoutant le nom de la personne souhaitée et une dédicace !

En adoptant un récif entier, un suivi photographique en plus d’un certificat d’adoption est proposé. Tous les 6 mois, une photo de la structure est disponible sur notre site internet ou le site Reefscapers afin d’observer l’évolution de ton récif.  

Pour jeter un coup d’œil aux coraux et récifs à l’adoption.

Sources :

PAR Antoine Mondou